Les nouvelles énergies renouvelables peuvent-elles remplacer les centrales nucléaires ?

En principe, oui. Les nouvelles sources d’énergie renouvelable en Suisse ont un potentiel suffisant pour remplacer nos centrales nucléaires. Mais à condition de développer le stockage saisonnier pour l’électricité d’origine renouvelable, et en remplaçant les chauffages et chauffe-eau électriques directs par des solutions basées sur de la production renouvelable de chaleur.

Les cinq réacteurs des quatre centrales nucléaires suisses produisent en moyenne 24 TWh d’électricité par an (2018). Coïncidence frappante : le potentiel combiné des nouvelles énergies renouvelables pour la production de courant vert est estimé à 24 TWh ! Ainsi, si l’on considère uniquement le bilan annuel, l’électricité issue des nouvelles sources d’énergie renouvelables pourrait remplacer quasi entièrement la production de nos centrales nucléaires.

En réalité, la situation est un peu plus compliquée… La production nucléaire est très constante sur l’année (électricité dite de « ruban »), tandis que le potentiel de production de courant vert d’une part fluctue sur la journée et d’autre part est nettement plus important en été qu’en hiver, à cause des apports combinés du photovoltaïque et de l’hydraulique au fil de l’eau, environ 2,5 fois plus élevés en été qu’en hiver [→ Q11]. Si le stockage journalier, notamment via le pompage-turbinage, permet de lisser les courbes de production d’électricité renouvelable au quotidien, la différence saisonnière est plus complexe à résoudre.

Une option pourrait consister à exporter notre surplus de courant vert estival, et, en hiver, importer de l’électricité d’origine éolienne (par exemple). Notre bilan renouvelable serait ainsi équilibré sur l’année. C’est la solution préconisée dans le scénario 100 % renouvelable [→ Q87].

Mais pourquoi se limiter à ne remplacer que l’électricité nucléaire par de l’électricité renouvelable ? Dans les cas où l’électricité nucléaire sert aujourd’hui à produire de la chaleur, la substitution par de la chaleur d’origine renouvelable est déjà possible. Aujourd’hui, environ 5 TWh d’électricité sont consommés dans des chauffe-eau et des chauffages électriques directs (chauffage à résistance), dont les 2/3 sur la période d’octobre à avril. Les potentiels encore inexploités de la biomasse bois (5 TWh) [→ Q54] permettraient largement de remplacer cette consommation d’électricité hivernale.

Arithmétiquement parlant, il serait donc possible de remplacer les centrales nucléaires par des nouvelles sources d’énergie renouvelable. Cet exercice comptable ne doit cependant pas oblitérer deux faits :

Premièrement, la sortie du nucléaire n’est pas le seul défi auquel la Suisse fait face. Les énergies renouvelables doivent servir un dessein plus large que le simple remplacement de l’électricité nucléaire. En particulier, elles doivent contribuer à la décarbonisation de notre mix énergétique, ce qui implique qu’elles remplacent progressivement notre consommation d’énergie fossile.

Deuxièmement, le remplacement des centrales nucléaires par des nouvelles énergies renouvelables ne sera possible dans les faits que si l’acceptation sociale pour ces formes d’énergie est suffisante, que la main d’œuvre requise soit trouvée, que des règles de marché adéquates soient proposées pour permettre à ces énergies d’être concurrentielles, et que les citoyens participent au tournant énergétique en adoptant ces formes d’énergie [→ Q98].

Références

Kemmler, Spillmann & Koziel (2018)
, & (). Ex-post-analyse des schweizerischen energieverbrauchs 2000-2017 nach bestimmungsfaktoren. Office fédéral de l'énergie (OFEN).
Office fédéral de l'énergie (OFEN) (2018)
(). Statistique suisse de l’électricité 2018. OFEN.
Office fédéral de l'énergie (OFEN) (2019)
(). Statistique globale de l’énergie 2018. OFEN.
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